Et en nous grandit cette galvanisante sensation d’être en train de vivre un moment exceptionnel
Après la sortie de son dernier album Sirens – qui divise la rédaction – Nicolas Jaar était de retour à Paris pour deux dates très attendues. Nous étions à la première, mardi 29 novembre à l’Elysée Montmartre, et nous n’avons pas été déçus.
Publié sur Traxmag.com le 01/12/16
Par Sylvain Di Cristo
La queue est immense devant l’Elysée Montmartre. Cette seconde date parisienne ajoutée à la dernière minute affiche complet, comme celle du lendemain au Trianon dont les places étaient parties en deux minutes, montre en main.
Sous l’immense voûte flambant neuve de la légendaire salle du quartier de Pigalle, l’excitation est toute aussi palpable, à tel point que, sur l’impressionnante introduction ambient de l’Américano-Chilien, certains sautillent sur un kick inexistant mais extrêmement attendu. D’autres, pendant la méconnaissable version live de « Killing Time » (l’ouverture de plus de 11 minutes de son dernier album Sirens), hurlent quelques « allez-là » inconvenants. On ne vient pas à un concert de Nicolas Jaar avec l’objectif d’en découdre avec le dancefloor façon club.
Mais on peut comprendre car quand on part de si bas, d’un tel silence, d’une telle obscurité, d’une telle incertitude quant à ce qui va nous tomber dessus… Quand le kick frappe enfin, c’est l’explosion. C’est un concert de Rage Against The Machine en une demi-seconde, une claque libératrice.
Puis vient l’étonnement quand le garçon de 26 ans prend le saxophone pour quelques envolées psychédéliques, juste avant de basculer sur l’un de ses premiers titres bruitistes « Why Didn’t You Save Me » de 2011. La scénographie est un délice de minimalisme où, comme avec son projet Darkside, seuls les contours de l’artiste se dessinent avec lenteur à travers la fumée. Les choses évoluent doucement mais sûrement et nous traversons ses derniers travaux revisités à l’occasion de cette nouvelle tournée. « Swim« , « No« , « Fight« , « Space Is Only Noise » ou le très rockabilly « Three Sides Of Nazareth« , entrecoupés de bugs sonores, de grésillements de saturation, et en nous grandit cette galvanisante sensation d’être en train de vivre un moment exceptionnel.
Après un premier rappel et l’exécution ralentie de son œuvre majeure « Time For Us« , l’élégant Nicolas Jaar prend un virage plus « DJ set » où l’on prend conscience que nous sommes déjà en train de nous dandiner. Cela fait deux heures que cet insolent génie nous balade dans les jardins de son esprit et l’apothéose émotionnel tombe au tout dernier instant, lors d’un passage solaire qui empreinte un sample des Temptations (« Just My Imagination », déjà utilisé dans son récent projet de webradio). Béats et conquis, les lumières se rallument et le constat s’impose naturellement : les live de Jaar ont encore une longueur d’avance sur la plupart des artistes électroniques actuels.
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