Weather Festival Music : une communauté pas comme les autres

Miroir d’un public technophile amoureux et d’une scène qui se porte à merveille.

Dans un monde virtuel où la culture du hater est encore reine, il se détache une communauté d’internautes français positive, pacifique et cool qui semble vibrer pour une seule et même chose : le partage de l’amour de la musique électronique. Voyez cet article un peu comme une enquête, une interview, une tribune aussi, mais bien au-delà, un hommage au groupe Facebook du Weather Festival, miroir d’un public technophile amoureux et d’une scène qui se porte à merveille.

Publié sur Traxmag.com le 9/3/15
Par Sylvain Di Cristo

Une histoire méconnue

Lors de sa création au lendemain de l’édition 2014 du Weather Festival au Bourget, on pouvait lire un peu partout non seulement une unanimité autour de la réussite du festival, mais aussi qu’un petit groupe Facebook en était sorti de sa cuisse. Le Weather Music venait d’accueillir 700 membres d’un coup suite à un repartage de la page fan du festival lui-même, de Concrete et de Surpr!ze (la boite de production qui gère ces deux entités) — ce que les médias s’empressèrent de repartager à leur tour. Et pour les mecs derrière cette innocente initiative, ce fut un cadeau totalement inattendu, et l’officialisation de son lancement. À l’origine du groupe qui compte actuellement presque 17 000 membres, le collectif français BASS y bouzouk et Stéphane De Saint Louvent qui nous en conta l’histoire, toute simple finalement : « Avec notre collectif et tous les potes qui gravitent autour de nous, on a voulu créer un groupe pour retrouver les tracks qui avaient été joués par les artistes durant cette édition du Weather Festival. Il ne s’agissait que de ça à la base, une simple plateforme où chacun pouvait filer les morceaux qu’il avait reconnu. » D’abord « ouvert à tous », pour parer la montée grandissante des spams en tous genres, le groupe passa en « fermé » après l’énorme affluence qu’il draina très rapidement.

Weather Festival

Aujourd’hui, pour intégrer le groupe, il faut en faire la demande. Ce sont donc les membres du collectif mais aussi la team du festival qui en sont les modérateurs. « On checke juste si le profil n’est pas un faux compte, ou un compte dédié à l’advertising abusif, mais ça reste évidemment un espace ouvert à tous. Et pour la modération des posts, on est très cool sur ça, on enlève uniquement les pubs qui n’ont rien à voir avec le groupe. » Nous n’avons même pas à demander à Stéphane ce qu’il advient des posts et commentaires déplacés, profondément méchants ou choquants (le pain quotidien d’Internet), sur le Weather Music, ils sont quasiment inexistants. Comme une zone de paix à l’intérieur d’un monde virtuel en perpétuelle guerre. Mais plus que la paix, il se partage au sein de cette communauté un sentiment général d’unité qui permet au groupe d’assurer une mutation vers un plus grand dessein que ce à quoi le groupe aspirait à l’origine (la simple demande d’IDs (identité) des tracks joués au Weather Festival).

Une mutation positive

Pendant un temps, disons les deux mois qui suivirent les événements du Weather (rappelez-vous de l’Institut du Monde Arabe, de l’île Seguin et des off parties au Rex, Concrete, Machine et Batofar), le groupe n’échangea pratiquement que des informations sur les morceaux joués lors de ces événements là. Les demandes de track-ID prennent alors la forme de vidéos à la qualité plus ou moins dégueulasse, dont le cadrage est souvent méprisé car inutile : seul le son importe pour reconnaitre le track. Puis petit à petit, ces mêmes vidéos attestèrent d’autres DJ sets, d’autres festivals, mais aussi d’autres soirées clubbing, raves, boums, bref, toute manifestation musicale pourvu que la musique soit électronique.

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Un nouveau super-héros était né : plus fort que l’application Shazam, le Weather Music venait à la rescousse de tous les plus démunis, nous permettant de revivre encore et encore ce moment de la veille qui nous faisait hurler : « MEC C’EST QUOI CE TRACK DE FOU ?! »

 

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C’est gentiment demandé, c’est gentiment répondu, tout le monde est peace, tout le monde n’est qu’amour. Il n’y a pas de problème. Peu à peu, les demandent se sont diversifiées et les bons plans soirées ont même trouvé leur place sur le groupe. Les soirées house, techno ou gabber du week-end à Paris ? Le meilleur festival en littoral ? Les bons disquaires de Rotterdam ? Et pourquoi ne pas faire confiance à ce mec qui connaissait avant moi l’identité du son qui m’a hier fait frissonner, hein ?

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Aujourd’hui sur le groupe, les demandes se diversifient…
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…tellement que certaines sortent de la sphère électronique

 

Théâtre du love et de la blague

Alors bien sûr, des coups de gueule, il y en a (on ne refait pas Internet). Mais, minoritaires, ils sont toujours noyés par un flot de messages positifs qui vont à l’encontre de la pensée formatée et tyrannique qui règne sur la Toile. Des blagues, des actes de charité plus ou moins incroyables, des informations gratuites en tous genres, mais surtout des compliments, choses rarissimes dans ce monde — virtuel ou réel d’ailleurs. Exemple avec la période post Weather Winter sur le groupe, entre demandes d’objets trouvés et messages de soutien :

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En fait, dans ce groupe, on se sent bien, on ne se sent pas jugé, on prend plaisir à découvrir et à faire découvrir. Nous sommes au cœur d’un carrefour d’informations que s’échangent des personnes qui possèdent cette même chose qui nous anime : l’amour de la musique. Alors pourquoi tant d’amour, tant de gentillesse et de partage en ligne ? La techno fédèrerait-elle autant en fosse que derrière un écran ? Rendrait-elle aimant, nous apaiserait-elle, nous rendrait-elle meilleurs en fin de compte ? Mais au delà de ça, l’effet apparemment cordial que la techno seule produit sur nous autres internautes rejoindrait-il celui d’une montée d’amour devant un DJ set, le portable qui enregistre dans l’autre main ?

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